Lorsque j’étais en deuxième année du secondaire, j’apprenais à écrire une nouvelle littéraire. La fin du récit devait être inattendue. Ma première nouvelle, courte, se résumait de mémoire ainsi :
Un homme attend une femme sur un banc de parc. Ils se sont donné rendez-vous après une longue absence. Il attend. Elle est en retard. Il continue d’attendre, anxieux qu’elle ne vienne pas. Il demeure sur le banc. Il espère son arrivée. Elle n’arrive pas. Il consulte sans cesse sa montre et regarde au loin, à l’horizon, de tous les côtés. Aucune trace d’elle.
Après plusieurs heures d’attente, il décide de partir. Il se lève. Au même moment, il l’aperçoit au loin. Elle vient vers lui, pressée. Son cœur s’allume, il bat, impatient de la revoir. Il sourit. Elle sourit aussi.
Elle s’approche de lui, ils s’apprêtent à se saluer, à se parler, à s’étreindre.
Une explosion nucléaire les anéantit.
Lorsque j’avais 13 ans, en rédigeant cette nouvelle, je me moquais du professeur avec la fin de cette histoire. Je la trouvais drôle. Le professeur jugeait pour sa part que ce n’était pas réaliste, il ne l’avait pas aimée.
Plus tard, j’ai visité Hiroshima et Nagasaki. J’ai réalisé que mon histoire avait été plausible. Elle avait pu avoir été vécue dans l’une de ces deux villes. Ma comédie devenait tout à coup une tragédie.
Je crains maintenant que cette nouvelle devienne actualité.